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Thursday, October 15, 2020

Rev. Christina Moreira ARCWP Preaches Sermon at Ecumenical Gathering in Strasbourg, France, Sermon in French

Christina Moreira ARCWP preaching in France 

Antenne Inclusive Saint Guillaume, in Robertsau church, Strasbourg, on Saturday October 10th.

 Prêche pour le culte inclusif et musical Aretha Franklin- Antenne inclusive saint Guillaume

Strasbourg le 10 octobre 2020

N’AIE PAS PEUR, JE T’AIME

Textes bibliques

Osée 11,1-4 (BFC)

1 « Quand Israël était jeune, je me suis mis à l'aimer, dit le Seigneur, et je l'ai appelé, lui mon fils, à sortir d'Égypte. »

2– Mais ensuite, plus on les appelait, plus ils s'éloignaient. Mon peuple offre des sacrifices à Baal et aux dieux de cette espèce, il brûle des offrandes en l'honneur des idoles.

3« C’est pourtant moi qui avais guidé les premiers pas d'Éfraïm et l'avais porté dans mes bras. Mais il n'a pas reconnu que je prenais soin de lui. 4Je le dirigeais avec ménagement, lié à lui par l'amour. J'étais pour lui comme une mère qui soulève son petit enfant tout contre sa joue.

Je me penchais vers lui pour le faire manger.

Matthieu 14,22-32

22Aussitôt Jésus obligea les disciples à remonter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait les foules. 

23Et, après avoir renvoyé les foules, il monta dans la montagne pour prier à l’écart. Le soir venu, il était là, seul. 

24La barque se trouvait déjà à plusieurs centaines de mètres de la terre ; elle était battue par les vagues, le vent étant contraire. 

25Vers la fin de la nuit, il vint vers eux en marchant sur la mer. 

26En le voyant marcher sur la mer, les disciples furent affolés : « C’est un fantôme », disaient-ils, et, de peur, ils poussèrent des cris. 

27Mais aussitôt, Jésus leur parla : « Confiance, c’est moi, n’ayez pas peur ! » 

28S’adressant à lui, Pierre lui dit : « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux. » – 

29« Viens », dit-il. Et Pierre, descendu de la barque, marcha sur les eaux et alla vers Jésus. 

30Mais, en voyant le vent, il eut peur et, commençant à couler, il s’écria : « Seigneur, sauve-moi ! » 

31Aussitôt, Jésus, tendant la main, le saisit en lui disant : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » 

32Et quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba. 

33Ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant lui et lui dirent : « Vraiment, tu es Fils de Dieu ! »

Chers frères et sœurs, Permettez-moi tout d’abord de vous saluer et de vous remercier pour votre hospitalité et d’avoir la bonté d’écouter les quelques mots que je vais vous adresser. Je souhaite à Jean-Luc Gadreau, qui aurait dû occuper cette place de recouvrer pleinement la santé bientôt.


Pour commencer, j’appelle votre mémoire à la rescousse, les souvenirs de ces jours où tout fait défaut, où nous perdons pied et le sol vient à manquer. Un être est parti et, comme dit le poème, tout est dépeuplé. Le vide de l’absence de cet enfant, cet ami, ce père, cette mère ressemble à un gouffre que rien ne peut combler. C’est l’heure sombre, et nous sombrons. 

Savez-vous pourquoi nous tombons, le plus souvent, en marchant, par exemple, dans la rue ? parce que nous avons la « croyance » du sol sous nos pieds. Nous le tenons pour acquis et oublions de regarder. C’est le moment dont profitent les dalles mal posées, les petites marches sournoises, le pavé cassé pour nous faire découvrir la terre et la douleur du membre mal en point. Cela peut nous couter la vie.

Regarder où nous mettons les pieds, vivre conscients de ce qui arrive, mettre un nom sur ce deuil, ce chômage, cette absence, cet exil ou la douleur qui vient frapper et demeure plus ou moins longtemps, mettre un nom sur l’incertitude qui s’est installée dans nos vies sous ce nouveau régime covid et il ne faut qu’un pas de plus pour nommer notre réponse à tout cela.

Que décidons-nous d’y répondre ?

Sur la barque, où Jésus a renvoyé ses disciples, ces derniers sont en sécurité, toute relative au milieu de la tempête qui la fait tanguer ; ils se savent vulnérables car ils ne connaissent que trop le sort d’autres qui n’en sont pas revenus. Je viens de l’extrême côte occidentale de l’Europe, une vraie figure de proue dont le nom fait frémir ; « la côte de la mort ». Chez nous, la tempête vient cueillir ses victimes sur les plages et les jetées, les vagues font facilement plusieurs mètres de haut. On ne badine pas avec la mer, même si elle porte le nom trompeur de Lac… de Galilée elle connaît des tempêtes imprévisibles et effroyables. Comment croire que quelqu’un peut marcher sur les vaques déchainées à moins de les surfer. Mais Jésus ne surfe pas. Marcher est chez lui l’action de la vie. Aux malades guéris il dit « va », « lève-toi et marche ». Son propos, c’est l’humain debout et en chemin, pleinement vivant et en possession de sa liberté, capable d’accomplir ce qu’il est pour lui et pour les autres, c’est l’humain qui marche à l’amour et la confiance pour combustible. C’est l’humain qui ne sait peut-être pas où il va mais qui croit fort au sens de sa vie. Il met sa main dans celle du Seigneur et dépose sa volonté dans la Sienne.

Parler de marcher sur la mer revient à prononcer un non-sens. C’est le monde à l’envers par définition. Afin de nous occuper de notre besoin naturel de savoir si « c’est vrai », si ce miracle -raconté dans 2 évangiles synoptiques (mt et mc) et l’évangile de Jean- s’est véritablement passé comme le récit nous l’apprend, bref, de savoir si la foi peut nous affranchir des limites de la physique, dans l’état actuel des sciences, peut-être pouvons-nous visiter nos mers intérieures déchainées personnelles et collectives.

La colère, la jalousie, la gourmandise, la convoitise, le désespoir ou la honte menacent certains jours d’emporter tous les fruits de longues années d’écoute de la parole de Dieu, méditée assidument, avec amour. Elles y réussissent parfois, souvent ? En un instant je deviens un monstre… je frappe mon enfant, ma femme, mon chien, ou je les insulte, je les rabaisse ou je feins de ne pas les voir. Je peux maudire même un inconnu qui m’a refusé la priorité sur la route. Qu’importe ? la paix est partie… envolée. Mais le pire ennemi de la paix, c’est la peur, la mère des guerres. Je vous partage un trésor offert par un volontaire ATD qui me raccompagnait à l’aéroport après une mission. Nous allions nous engager dans la bretelle d’accès lorsqu’un véhicule nous dépasse par la gauche et nous fait une superbe queue de poisson. Je peste car j’ai très peur des accidents de voiture et nous avions frôlé la catastrophe. Réponse du conducteur : « je fais comme monsieur Parfait (un volontaire africain que nous admirons tous, un sage) et je dis « tu es pressé mon frère, que Dieu te bénisse » ». La paix est aussitôt revenue, la peur s’est envolée et l’amour a pris toute sa place.

La peur est ce qui fait couler Pierre qui, dans son rôle d’apôtre nous représente tous. Il est à la fois mis en avant comme celui qui a assez d’amour et de courage pour s’élancer à la rencontre de son Maître, de suivre son élan que nous voulons pour nous, et son échec en est d’autant plus cuisant. Il met en lumière notre nature, notre vie qui souvent ressemble à une suite d’essais et de tests plus ou moins réussis. Nous aspirons au « jusqu’au bout », au « tout amour sans faille », celui que ce même Pierre a dû affirmer trois fois à son Seigneur après ses reniements.

Cet amour, il faut qu’il habite en nous pour que nous soyons capables de le reconnaître chez Celui / Celle qui est tout Amour. Nous entrevoyons ce soleil que cachent les nuages, l’accalmie qui s’annonce lorsque les rafales de vent commencent à s’espacer… nous savons qu’il est là. Il l’a promis, le Seigneur est avec nous jusqu’à la fin du monde (Osée) et depuis l’enfance de l’humanité, et à jamais son amour et son attention nous sont assurés « Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde. » (Mt 28,20).

Mais qu’est-il cet amour, de quoi est-il fait. Il ne s’agit pas d’une pure émotion ou d’un sentiment uniquement. Écoutons Osée, qu’est-ce que l’amour qui vient de Dieu : « C'est pourtant moi qui avais guidé les premiers pas d'Éfraïm et l'avais porté dans mes bras. Mais il n'a pas reconnu que je prenais soin de lui. 4Je le dirigeais avec ménagement, lié à lui par l'amour. J'étais pour lui comme une mère qui soulève son petit enfant tout contre sa joue. Je me penchais vers lui pour le faire manger”. Cet amour est fait d’attention au singulier et au pluriel, il est en actions, il prend part à la vie de ceux et celles qui sont des enfants, de tout petits enfants, cherche à les nourrir et les comble de tendresse. Dieu est une maman, la meilleure ! 

Mais cette maman essuie des déceptions, elle n’est pas toujours aimée en retour « Mais il n'a pas reconnu que je prenais soin de lui » sans toutefois se lasser ni renoncer. Il est question d’amour absolu, éternel, capable de tous les pardons et de tous les recommencements.

Ne lisons-nous pas, dans le libre du prophète Isaïe (49,14‑15): «Sion disait: L’Eternel m’abandonne, ¡Le Seigneur m’oublie! - 15Une femme oublie-t-elle l'enfant qu'elle allaite ? N'a-t-elle pas pitié du fruit de ses entrailles ? Quand elle l'oublierait, Moi je ne t'oublierai point. ». Ces versets nous aident encore à creuser dans les profondeurs de l’amour divin, qui est calqué sur le patron de l’amour humain. C’est le monde à l’envers, Dieu se montre en Mère, en nourrisse et en porteuse de vie. Nous sommes dans le ventre de Dieu, jamais seul-e-s, toujours incorporé-e-s dans sa grâce. Peut-être est-ce pour cela que nous l’oublions… Elle nous entoure de toutes parts.

Il est question de liens, Dieu se relie le premier, le premier il appelle et ne cesse d’appeler. Et cet appel est en vue du bien "des appelé-e-s, il en va de leur croissance, de leur dignité, de leur nourriture, de l’essentiel en somme. 

Que veut dire « je t’aime » ? Nos je t’aime sont ambigus, pas toujours inconditionnels et moins encore gratuits. Nous attendons en retour et faisons des calculs plus ou moins honorables. Nous calibrons l’autre et le jaugeons à l’aune de nos besoins. Ils sont fragiles et ne résistent pas toujours aux tempêtes, même les plus petites qui ont lieu souvent au milieu d’une assiette de soupe. Ils ne tiennent pas toujours la route dans la maladie, le malheur, la vieillesse, les difficultés financières. Il est évident que lorsque Dieu nous dit « je t’aime » Il parle une autre langue. Le verbe aimer peut prendre plusieurs sens. L’amour d’amitié, l’amour de la passion physique, l’amour inconditionnel… Aimer est un verbe au mode actif, notamment dans la Bible « Jésus le regarda et se prit à l’aimer » (Marc 10.21). Jésus regarde avant d’aimer, il cherche à savoir qui est devant lui pour l’aimer, il n’aime pas tout le monde en vrac mais chacun chacune. C’est pour ensuite lui proposer son chemin sur le lac « …va, tout ce que tu as, vends-le, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor dans le Ciel, puis viens, suis-moi”.

Encore … VIENS… qui résonne comme un shofar, con une sirène dans nos nuits, y compris en ce moment où ce microbe a effacé les lisières de nos mondes et de nos foyers, où nos repères sont brouillés et où il nous faut marcher sans trop savoir où nous allons, un peu perdus et perplexes.

Il change le monde, il y a une intervention qui entraine des modifications… qui peuvent tout transformer si nous l’entendons, la matérialisation du respect selon Aretha devient possible et aisée, des miracles qui sont comparables à marcher sur l’eau dans le monde d’aujourd’hui. C’est pourquoi, à la question de savoir si oui ou non Jésus a marché sur l’eau, nous serions tentés de dire : s’il a pu laisser sur cette terre un message d’amour qui produit l’amour vrai lorsqu’on y adhère en vérité… que n’a-t-il pu faire ?

Alors le Verbe se fait chair car l’amour habite en nous, parmi nous, en face de nous, chez le voisin, la voisine. Il efface ce que l’œil de la raison appelle les « différences », ces mirages installés par le Diviseur… ce mal qui ronge nos sociétés fabricante d’étiquettes basées sur la peur du, de la différente, à défaut de pouvoir fabriquer toute la dignité, tout le respect qu’il est de son devoir de produire si elle se veut légitimement humaine.

Le Verbe fait chair en Jésus : « change is gonna come » (Aretha). Lorsque Jésus approche de la barque nous avons une scène en deux tons contrastés : Jésus qui marche seul d’un pas décidé et extrêmement confiant, et la barque, où des hommes apeurés ne savent plus si craindre plus la tempête ou ce fantôme. Lorsque nous évoquons la venue du Christ, sa naissance enfant il y a plus de 2000 ans, mais aussi sa naissance dans nos vies présentes, maintes fois tentée à des moments différents, au creux de notre existence, de nos vies de chair, il se trouve souvent qu’elle nous surprenne dans la crainte, car c’est pour beaucoup un état quasi naturel. Nous avons été éduqués souvent par des moyens de peur (peur des châtiments pour désobéissance, peur de dire qui je suis et ce que je pense, ce que je ressens… car cela peut ne pas plaire et je serai rejetée… peur de ce que je ne comprends pas et que je perçois comme un danger d’emblée… peur parce que quelqu’un crie : tu vas tomber ! et j’apprends à faire attention mais je n’ose plus m’élancer). Peur de l’étranger ou de la différente, peur du jugement des autres et des miens. Jésus porte un autre enseignement ; « n’ayez pas peur, c’est moi »

Il se fait chair en nous lorsque nous savons répondre à ce VIENS. Nous détenons également la liberté souveraine de ne pas le faire, autre cadeau d’amour de Dieu et non des moindres. Tous ces instants, même insignifiants où nous pensons à ouvrir notre cœur, nos oreilles, aux autres et à Dieu nous relient à Sa main tendue. Y compris lorsque Aretha chante « I say a little prayer for you » juste avant de se maquiller, un matin comme les autres au milieu d’une vie ordinaire. Elle garde le contact. Avec son amoureux et avec Dieu. Nos vies, comme elles sont, telles qu’elles sont à ce moment précis, sont le lieu du contact, de la confiance, de la main tendue. Il n’est pas indispensable de couler et travailler à l’éviter n’est pas une tâche pénible mais joyeuse. Juste tendre la main, même en silence. La mer se calmera au cœur de nos obscurités, nos difficultés, nos bêtises en créant des recommencements toujours possibles.

Mais encore faut-il, pour franchir la rambarde… se souvenir de sa liberté et en faire usage. Oser faire le pas. Nous remarquons que seul Pierre s’y risque, il a ce mérite d’être un peu fou, passionné et impulsif. Des attitudes qui sont autant de pistes  qui pourraient nous guider pour  renouveler notre confiance au quotidien, pour garder Sa main dans notre main. 

Nous apercevrions-nous, alors que ce n’est finalement pas être trop bête que de croire que nous pouvons marcher sur l’eau à sa suite, à ses côtés… si seulement nous pouvions entendre, laisser plonger dans nos cœurs, nos intelligences, notre corps tout entier le son de son « VIENS » sa tendresse décidée et tellement puissante car éternelle. 

Et nous pourrions dire avec Paul, à qui cette Tendresse toute puissante fait dire, dans l’Épître aux Romains, 8, 38-39 

« 38Car j'ai l'assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les choses présentes ni les choses à venir, ni les puissances, 39ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur. »

Qui a encore peur après cela ? Qui doute encore de l’amour de Dieu et de son pouvoir ?

Avec Aretha Franklin, nous pouvons dire : « Precious Lord, take my hand, lead me on, let me stand, I’m tired, I’m weak, I’m lone, through the night, lead me on to the light, take my hand precious Lord, lead me home »






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